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Le cycle « 18. Oktober 1977 », inspiré de la fin tragique de la Fraction armée
rouge, marque un moment charnière. Ces quinze toiles où les visages et les corps
apparaissent à peine avant de se dissoudre traduisent le poids de l’histoire récente
allemande. Loin de tout pathos, Richter installe une atmosphère de silence et de
gravité qui résonne profondément avec la mémoire collective.
Au fil des décennies suivantes, Richter multiplie les explorations. Ses grandes abs-
tractions des années 2000, regroupées sous le titre « Cage », rendent hommage au
compositeur américain John Cage et s’imposent par leur intensité colorée et ryth-
mique. Ses expérimentations numériques, comme les séries « Strip », créent des
bandes de couleurs dérivées par ordinateur prolongeant sa recherche sur l’aléa-
toire et la combinatoire. Ses œuvres en verre et en miroir, quant à elles, déplacent
la question de la peinture vers l’espace, transformant l’expérience du spectateur
en un jeu de reflets et de transparences.
Le point culminant de l’exposition parisienne reste l’installation « Birkenau »
(2014). Partant de quatre photographies prises clandestinement dans un camp
d’extermination, Richter a repeint puis recouvert ces images jusqu’à les effacer
presque totalement. Ce geste radical, à la fois effacement et mémoire, souligne
l’impossibilité de représenter l’horreur, tout en confrontant le spectateur à sa
propre position face à l’Histoire.
Le dispositif de miroirs accrochés en vis-à-vis double encore cette expérience,
transformant le regardeur en partie intégrante de l’œuvre.
Gerhard Richter, Onkel Rudi [Oncle
Rudi], 1965 (CR 85) Huile sur toile, 87 x 50 cml Collection Lidice Memorial, |
République Tchèque © Gerhard Richter 2025 (18102025)